deviendra grand mais avant, il va devoir apprendre du vieux dragon.
Central Park
Un petit papier avait volé jusqu'à lui. Il l'avait trouvé un beau matin, coincé entre deux branches. Il s'agissait d'une petite annonce demandant l'aide d'un professeur d'art martial.
(clap clap)
Ça méritait des applaudissements. Le destin avait une drôle d'imagination quand il voulait et pas une seule seconde le moine n'avait hésité. Il écrivit une petite lettre, sur un papier aux odeurs de rose et avait chargé quelqu'un d'aller la remettre à son futur élève. Il avait été clair et à la fois court; une indication de sa maison, une heure, une date, et avec ça, une petite fleur d'Abutilon, pour annoncer la couleur. Fier et heureux de sa prouesse, il n'avait plus qu'une hâte; devenir son professeur.
Et pourtant, il y avait quelque chose de cruel dans l'apprentissage; on ne pouvait apprendre sans sacrifier quelque chose en échange, que ça ait été des efforts, du temps de l'argent. Et pourtant l'humain était fasciné par la découverte, il avait toujours besoin d'apprendre encore et encore. Peut-être faisait-il ça pour donner un sens à sa vie, aussi courte pouvait-elle être. Qu'importe les raisons, Diki était, lui, prêt à faire passer son savoir, et faire subsister cette flamme de connaissances, immortelle tant qu'elle sera partagée. Car oui, le moine savait, la vie n'était qu'une bougie, et quand la sienne ne brillera plus, il faudra bien quelqu'un pour le remplacer, quelque chose pour faire continuer de vivre son être à travers des écrits, une avancée, ou par le cœur et les paroles d'autres.
La vie était cruelle et pourtant elle était belle. Du moins Diki n'en pensait pas moins. Il était d'ailleurs empli d'une grande joie à l'idée de recevoir son élève. Il avait réfléchi à cent fois à ce qu'ils allaient faire, ce qu'il allait dire pour finalement se laisser aller au grès de Dame destinée. Après tout, comment faire autrement. C'est elle qui l'avait guidé jusqu'à cette grande maison, prise en otage par la nature, placée en hauteur, haut dessus d'un petit lac.
Un petit coin de paradis, cadeau qu'il chérissait comme la prunelle de ses yeux, sans pourtant en changer quoique ce soit.
Pourtant, en ce matin ensoleillé, sa maison était propre, rangée à sa façon, dans ce doux chaos de plantation permanent autant à l'extérieur qu'à l'intérieur. Les murs étaient recouverts de lierres, et c'est dans le sol que poussaient sans crier gare, de petites fleurs, marguerites et boutons d'or. Diki les avait accueilli d'un sourire autant que ses fenêtres étaient constamment ouvertes pour laisser entrer et sortir les oiseaux de la ville, petits et gros, pour aller se réfugier et manger dans ce village d'habitants ailés, constitué de maisons accrochées au très haut plafond, pendues dans le vide. Ça apportait à la maison, une vie, sauvage et à la fois saine. Mais cela restait tout de même une maison et de par la porte, commençait un grand salon, fait de canapés entourés de beaux voiles orientaux, et d'un tronc d'arbre improvisé en table basse. Les tableaux aux murs sont restés des œuvres d'art, désormais accompagnés par des fleurs et des lianes, et pourtant, malgré le caractère possessif de cette nature, l'électricité subsiste. Des ampoules au mur, pour l'instant pas allumées, la lumière du jour effectuant déjà à merveille son travail, donnant à l'ambiance de l'habitation toute entière, quelque chose de féerique, de trop beau, de trop dépaysant pour être vrai. Et pourtant. Cet univers continuait d'exister envers et contre tout, Diki avec, sans l'aide de personne. La nature en toute sa splendeur, belle et forte, dans laquelle il trouvait une inspiration, une stupeur même qu'il pouvait dire ses cinq petits mots; La nature est mon idole.
Et il voulait que son élève comprenne le sens, l'intègre et le vive. Mais il n'était pas capable d'obliger, il ne pouvait que léguer un bagage et voir si il allait le prendre ou non. Et pas qu'il allait être déçu, car l'humain est un être imprévisible, qui lui donne ce charme impétueux. Alors il l'attendait, le cœur chaud, le visage ouvert, souriant, les bras croisés dans ses trop grandes manches, habit de moine, de lumière et de tissus de couleurs chaudes. Il était là, prêt, flambant d'une passion du kung-fu shaolin et pourtant si doux, si inoffensif, si accueillant, lui et sa petite maison de pierres et de fleurs.