Raven avait les yeux fixés sur le reflet du petit objet qu’il tenait dans sa main. Cette petite perle l’avait tout de suite attirée, comme un aimant puissant. Ses instincts sont peut-être plus forts que lui au final ? Après tout, il n’avait pas hésité à partir à la recherche de ce qui compléterait sa collection. Avec un soupir, il faisait un constat alarmant : il ne lui avait fallu même pas une demie seconde avant de partir fouiner pour la retrouver quelques minutes plus tard. Était-il vraiment une bête maintenant ? Ou pire, un Beast ? Il ne pouvait pas nier qu’il n’était plus tout à fait humain, rien que son ouïe… Une horreur au début, tout était si vivace, si proche et si difficile à identifier dans tous ce charabia. Il savait qu’il était dur de la feuille avant, mais là ça frisait la comédie. Pourtant, il n’a pas d’oreilles de corbeau, est ce qu’ils ont des oreilles de toutes manières ? Tiens, c’était une bonne question. Elijah fronçait les sourcils perturbé, tout d’un coup moins passionné par sa perle. Comment ils entendent les oiseaux ? Il avait trouvé une encyclopédie le mois dernier dans des décombres, en très bon état, il regarderait plus tard ~
La pensée qu’il devait obtenir de lui-même une encyclopédie pour accéder à un savoir le fit grincer des dents. Bien entendu qu’il ne pouvait pas aller dans une simple bibliothèque, monstre qu’il était ! Prenez garde à la vilaine créature voleuse de perle ! Agrougrouuuu ! Il se renfrogna un peu plus sur son perchoir, les yeux plissés sur le ciel nuageux. La Lune Rouge toujours présente même en plein jour, elle était effrayante, comme si elle voulait rappeler sa toute-puissance à tout instant. Qu’y pouvait-il à présent ?
Il entendit un croassement et il tourna la tête peu convaincu. Lala Hamburger le regardait en sautillant sur sa branche. Elle était toujours aussi joyeuse au-dessus de lui, un peu translucide et donnant l’impression de n’être qu’une chimère de plus dans cette ville de fou. Il tendit le bras pour coincer la perle à la vue de Lala. Elle aimait aussi les trucs qui brillent, mais pas au même niveau que lui. Raven, lui c’était tout ce qui présentait un éclat scintillant. Lala, elle était juste avide de ce qui éveillait son intérêt à lui. Son anima était curieux tout le temps, dès qu’un truc bougeait, osait se mouvoir ou produire le moindre p’tit pet, elle était déjà en train de le fixer avec insistance. Une véritable alarme à elle seule. Et il se sentait en sécurité quand elle était à l’affût. Même si ses propres instincts ne le trompaient pas facilement, il aimait se détendre et ne pas penser à tout ce qui se cache derrière le désastre de l’astre rouge sanglant.
Pour une fois qu’il se posait, sans chercher à trouver d’autres trésors pour son bazar, à courir après un truc éclatant, à tenir le bazar ou à prendre la fuite quand il y a du grabuge. Non, aujourd’hui, il se posait, et puis il avait déjà trouver une perle, si ça c'était pas une journée constructive !
Hier aussi il s’était donné à fond, il avait trouvé des éléments électronique qui pourront être très pratique pour son nouveau projet de convertisseur d’énergie solaire, pas que les bougies pour éclairer sa boutique ce n’est pas mignon, mais c’est lassant de devoir refaire des bougies quand on n'a pas forcément la matière première. Heureusement que la cire d’abeille n’était pas introuvable…
Quand il remarqua que le temps s’assombrissait, il se dit qu’il était peut-être temps de se bouger ? Après tout, il avait faim, et il y avait plausiblement des choses à gérer à la boutique… ? Non qu’il s’inquiétait particulièrement, malgré qu’il habitait et travaillait dans le quartier le plus malfamé de New-York, il n’avait pas particulièrement peur de se faire voler. Oh ça arrivait, de temps en temps, il reconnaissait facilement les odeurs donc ce n’était pas un souci. Et en général ceux qui volaient étaient ceux qui avaient le plus de mal à trouver comment survivre donc il laissait faire. Cependant, la plupart des gens savaient que le Bazar était au sens propre un Bazar, dur de trouver ce que l’on veut sans lui demander au préalable, mais qui sait ? La chance existe.
Raven sauta du haut de son arbre après avoir récupéré sa perle. Il fallait qu’il prenne de la hauteur, mais il n’y arriverait pas avec celle minuscule de l’arbre. Un nouveau truc ça aussi, les hauteurs. Ça le vivifiait d’être le plus grand, le plus observateur de son perchoir. Un problème de mégalo corbique ? Qui sait, Lala faisait toujours en sorte d’être par-dessus lui. Comme si elle éprouvait une grande satisfaction à le jauger de là ou elle était. Grand bien lui fasse, elle ne voyait pas de toute manière vu qu’il portait ses grands vêtements amples et son masque. Aujourd’hui, il avait opté pas une grande cape qui lui permettait de cacher ses cheveux avec sa grande capuche. Son masque était celui qu’il portait habituellement, le masque de médecin de la peste, ça ne cachait pas ses yeux si peu humain cela dit.
Il s’empressa de rejoindre les élévations en gravissant avec agilité les gravats d’un ancien immeuble qui s’était scindé à cause d’un tremblement de terre. Il put avoir une belle vue sur l’ensemble et c’est avec souplesse qu’il se faufilait dans la nuit qui approchait. Les sens en alerte, il remarqua un groupe un peu suspect dans un coin et s’en éloigna. Ils avaient des armes. Lala croassa bruyamment, mais ça n’attira pas leurs attentions. Tant mieux. De toute manière, elle le savait très bien, ils semblaient préoccupés par d’autres choses, mais sait on jamais, que certains puissent sentir sa présence et vouloir le chasser. Il y a de tout dans le monde et les Anti Philia ça existe, même si c’est rare d’en trouver dans le coin.
Il prit une grande inspiration quand un effluve étrange attira son odorat. Lala battait frénétiquement des ailes, mais il ne saurait dire si c’est par excitation ou par peur. Ses plumes se hérissaient et son masque le démangeait à cause de ça. Une puissante nostalgie de son enfance lui déchirait la gorge et son corps voulu s’approcher de plus près. Qu’est-ce que c’était ? Son cœur calme, commençait à battre un peu plus vite. Curiosité. Le Corbeau en lui voulait savoir, il en mourrait d’envie. Elle était un peu plus loin, mais il faudrait descendre un peu, être à découvert. Et avec ce groupe suspect de tout à l’heure, ce n’était pas forcément la meilleure idée. Curiosité. Odeur. Vite. Elijah se mordit la lèvre, Raven lui fixait un point invisible. L’humain voulait échapper aux risques, le corbeau aurait donné son monde stupidement pour n’avoir qu’un indice. Finalement, c’est l’oiseau qui gagna. Un coup d’œil vers Lala scella son destin. Elle était tranquille sur son épaule, pas particulièrement attentive. Elle ne devait pas avoir peur plus que ça. Inconscience ? Ou alors elle en avait rien à faire ? Avec un sourire, il s’approcha de l’odeur, suivant sa trace subtile. Ça ne devait pas être loin et il avait vraiment l’impression de la connaître. Il descendit sans bruit par une échelle encore praticable et se mit à renifler les alentours. Il arriva à un coin de rue quand il croisa un autre être vivant, seul cette fois-ci. Du coup, moins dangereux pour lui. En théorie. Avec les mutants, on n’est jamais sûr de rien…
La lumière se fit dans son cervelet quand il observa avec plus d’attention. Ça le percuta avec violence, il se revoyait en train de fumer dans un squat pas loin de son lycée quand il était jeune. Complètement drogué, il suivait ses potes vers des contrées hypnotiques. Un univers où il ne subissait aucune pression de la société. Il était bien, mais aussi faible et inoffensif qu’un papillon. Un papillon qu’on pouvait écraser sans qu’il ne s’en rende compte. L’odeur lui donnait la nausée, il ne savait pas si c’étaient les souvenirs du passé qui le dégoûtait ou tout simplement la fragrance en elle-même. Il déglutit avec appréhension, et eut un mouvement de recul. Il ignorait que la drogue était dans le marché au Bronx. Pourtant, il était plutôt ouvert à toute rumeur, surtout quand ça parle de vente de nouveaux produits. Ça l’étonnait en fait que les gens aient réussi à refaire la recette, ou avaient ils trouvé la matière première ? Le bon espace pour le faire pousser ? Ou l’atelier pour l’extraire ? La drogue n’est pas aussi facile à faire, et elle comporte énormément de risques.
Ses yeux refixaient le Bonhomme complètement shooté. Devait-il le prévenir ? Le juger ? Lui faire prendre conscience que ça ne faisait que lui détruire le cerveau et ses pensées cohérentes ? Qu’il y avait d’autres façons de s’échapper ? Mais y’en avait il ? Elijah ferma les yeux, perdu. New-York n’était plus pareil, le mal grondait, la sauvagerie aux portes… Comment en vouloir à quelqu’un pour essayer de ne plus y penser ? Peut-être avait-il perdu toute sa famille, tout ses amis, qu’il subissait de grosses pressions… Vivre dans le Bronx après ça, ce n’était pas forcément preuve de la plus belle vie. Le doute le tracassait, mais il savait qu’il n’était pas heureux dans la période où il se droguait, non, il n’avait fait que semblant, se vautrant dans la facilité pour en souffrir plus tard.
Il entendit du bruit, et se retourna pour se concentrer sur l’origine. Encore ? Lala s’envola de son épaule pour se poser dans les hauteurs. Une Sentinelle, parce qu’elle sentait le danger ? Il fronça ses sourcils plumés et s’approcha discrètement, prenant bien soin de ne pas se faire repérer. C’était le groupe de tout à l’heure, ils avaient l’air de bêtes affamés, prêt pour la bataille. Une meute de loup organisé, qui ne chassait pas n’importe quel mouton.
« - Où est-ce qu’il est passé !? J’ai pourtant mis la dose… »
Un frisson d’effroi le prit. La dose ? Il recula pour rejoindre une autre rue et retomba sur l’émanation. Une pensée émergea dans son cerveau. La dose ? Il fixait le dos de celui qui devait sans doute vivre de formidables aventures au Pays des Merveilleux Idiots. Était-il la cible de ce groupe ? C’était plus que probable, il n’avait pas l’air effrayé, mais si ça se trouvait, il n’avait aucune idée qu’il était pourchassé. Arg, il ne pouvait pas le laisser là, le groupe s’approchait dangereusement de sa position. En quelques secondes, il prit sa décision. Ses jambes s’activaient tandis qu’il fonçait vers la silhouette à quelques dizaines de mètres de lui. Il lui choppa le bras en ralentissant, et continua sa route, forçant l’individu à le suivre.
« - D’pêches toi ! Ils arrivent ! »
Il ne savait pas s’il s’en rendrait compte, s’il se laisserait faire ou se mettrait à paniquer. Mais sa résolution était fixée. Il sauverait cet homme de ces chasseurs… Chasseurs de chais pas quoi. Il connaissait pas mal le quartier pour le fourrager toutes les semaines et y trouver une pièce digne d’intérêt. Il y avait un coin discret pas loin et il était septique que quiconque puisse les trouver là. Mais fallait-il encore que le spécimen se laisse faire.
To be continued ...