Le froid est insupportable (ou peut-être que c’est juste Lucrezia qui l’est, who knows) mais donne à l’adolescente une très bonne raison de traîner Klee jusque chez elle, où il fait beaucoup plus bon que dehors, sous le pont où elle rejoint souvent son ami pour dessiner, peindre, ne rien faire, juste être avec lui, selon le jour.

Il était peut-être pas à l’aise, Klee, après tout il avait toujours refusé de passer prendre le gouter chez elle, mais là, elle lui avait servi ses yeux doux et sa moue suppliante et elle avait gentiment demandé à son pote de la suivre chez elle parce que « j’ai les mains gelées et je veux rentrer mais en même temps je veux te voir et s’il te plait Klee, jtm :c » et en vrai, elle l’avait pris par la main et l’avait embarqué avec elle avant qu’il ne puisse vraiment protester.

En rentrant elle avait salué sa grand-mère en signant et lui avait rapidement expliqué que le petit bonhomme aux cheveux rouges était Klee, l’ami dont elle parlait souvent (non pas Hiroshi, ni Thana, l’autre). Et puis elle l’avait emmené dans sa chambre et ils avaient… et bien ils avaient passé l’après-midi à faire ce qu’ils auraient fait sous le pont, ils ont parlés, Lucrezia a dessiné, Klee lui a appris plein de trucs super interessants et elle lui avait donné du vocabulaire en langue des signes et il s’est rapidement fait tard (enfin non, pas trop) et noir. Et Lucrezia aurait pas vraiment été rassurée de laisser Klee rentrer chez lui tout seul (elle savait même pas dans quel quartier il habitait d’ailleurs) du coup elle lui avait envoyé une petite boule de papier au visage pour attirer son attention et dedans, elle avait marqué un « je reviens, bouge pas », comme s’il allait bouger, il irait où déjà, dans la maison inconnue ? même si il voulait partir, il aurait du passer devant le salon où allait Lulu, et, même sourde, elle l’aurait remarqué dans le couloir, avec ses cheveux rouges (impossible d’être discret avec ça).

Elle parla un instant avec sa grand mère avant de remonter en courant dans sa chambre. « Klee, tu restes ce soir ? » signa t-elle. contrôle surprise de langue des signes, comme ça.

Depuis la dernière fois, il avait revu Lucrezia souvent. Il ne savait pas vraiment pourquoi, mais la jeune fille venait souvent lui faire un coucou, et ils finissaient souvent par discuter d’une façon ou d’une autre, d’une chose ou d’une autre. C’était étrange à admettre, mais Klee était bien, en sa présence. Il se sentait à l’aise, et puis, voir quelqu’un était loin, bien loin de lui faire du mal. Il s’était mit à attendre à leur point de rendez vous habituel de plus en plus souvent, d’y passer, d’y rester, juste au cas où elle y serait. Ils n’avaient pas vraiment moyen de se joindre, et leurs rencontres se faisaient de manière totalement improvisées, mais la plupart du temps ils arrivaient à se retrouver.

Cette fois ci, les choses se déroulèrent un peu… Différemment. Il avait toujours contourné sa proposition de ‘passer chez elle’, mais, cette fois ci, il avait cédé malgré tout. Il n’était franchement pas à l’aise ne serait-ce qu’à l’idée d’aller chez quelqu’un, encore moins chez la seule personne avec qui il se sentait plutôt à l’aise dans ce bas monde, mais Lucrezia avait tellement insisté qu’il se sentait incapable de refuser. Il regretta très fort cette faiblesse dès qu’il dû dire bonjour à la grand-mère de la jeune rousse. Honnêtement, il n’était pas à l’aise ne serait-ce que pour son apparence. Même s’il faisait de son mieux pour rester propre, il était si loin d’être présentable. Ses cheveux n’avaient aucun sens, son teint était inquiétant et ses vêtements étaient, pour ainsi dire, hm, usés. Et puis, son apparence était une chose, la deuxième était, depuis combien de temps n’était-il pas rentré dans une maison ?? Comment on faisait déjà ?? Attendez, comment on s’adressait aux gens ? Complètement perdu, il réussit à articuler un « Euh, merci de votre accueil ? J’espère que je ne dérange pas, si c’est le cas n’hésitez pas à… Enfin, voila ? » Oh god, ce qu’il pouvait être socially awkward.

Même une fois dans la chambre de Lucrezia, bien qu’ils n’aient rien fait de spécial encore une fois, Klee avait sincèrement l’impression de faire tâche. Être en intérieur était quelque chose qu’il n’avait plus expérimenté depuis bien trop longtemps, et, il y pensait, mais, c’était la première fois que quelqu’un l’invitait comme ça ? Ca le perturbait vraiment, vraiment.

Alors maintenant, il faut vous dire que Lucrezia – après être partie un instant sous le regarde effaré de Klee qui l’avait regardé l’air de dire « hein » et n’osa pas bouger le temps qu’elle revienne – revenait en signant quelque chose qui ressemblait vraiment à « rester ce soir ». Enfin, il devait avoir mal vu.

« Euh, attends, tu m’as demandé si je restais ? Là ? Fin, je veux dire, ce soir ? Pour la nuit tu veux dire ? »

Il se demandait s’il avait fait une erreur et si Lucrezia était sérieuse. Il faisait pas d’erreurs sur des choses aussi simples mais – lui ??? Rester ?? « Attends, si c’est ce que tu veux dire, je, suis désolé mais, je, non ? » Il s’efforçait à parler doucement pour qu’elle puisse lire sur ses lèvres mais c’était difficile, il se retenait de pas tout débiter sous le coup de la surprise. « C’est pas contre toi hein, juste, euh, fin, je vais pas rester dormir chez quelqu’un d’autre, et…. » Oui, Klee n’avait jamais entendu parler des soirées pyjama, vraiment. « D’où te vient cette idée, déjà ? » C’était un concept qu’il ne connaissait absolument pas.

Socially awkward, c’est vraiment le mot parfait pour décrire Klee. Voyant sa gêne, Lucrezia pose une main dans son dos et le pousse doucement vers l’avant, vers sa chambre. C’est calme chez elle, alors elle entends quelques syllabes, comme un murmure. Elle écrit sur son carnet un « tu déranges pas du tout, je t’aurais pas amené ici si c’était le cas » qu’elle lui fourre dans les mains pour mieux pouvoir le pousser à avancer.

Et c’est pas si awkward que ça pour elle, d’être avec Klee sans trop savoir ou même avoir quoi faire de précis, c’était habituel, limite, vu comment ils se croisaient toujours que par hasard ou sur des coups de chances. Mais bon, c’était surement beaucoup plus awkward pour lui, vu qu’il était pas dans un endroit qu’il connaissait mais… il s’aclimaterait vite ? Elle espérait en tout cas, vu comment il était pas trop question qu’elle le laisse repartir avant le lendemain.

« Bah, oui, c’est exactement ce que je viens de proposer ? » et la rousse vient s’assoir sur son lit, en tailleur. « il fait déjà nuit et froid et ni moi, ni ma grand-mère serions tranquilles de te laisser partir maintenant. »

Et elle remarque bien qu’il à l’air mal à l’aise pour une raison ou pour une autre, parce qu’il allait pas rester dormir chez les gens apparement.

« Depuis quand je suis juste quelqu’un d’autre déjà ? Je suis ton amie non ? » ouais, c’était son amie alors elle voyait pas du tout le problème, elle. « Bah ? Je sais pas d’où elle me vient ? C’est juste ? Une idée comme ça ? » ouais, elle a signé chaque point d’interrogation.  « Enfin c’est pas bizarre où quoi, c’est même assez courant de s’inviter entre amis à passer la nuit comme ça. »

Mais après, Klee n’avait pas l’air d’un gars avec beaucoup d’amis, si ça se trouve, Lucrezia était même la seule.

« Est-ce que c’est parce que je suis une fille ? Non parce que si c’est le cas, je t’assure que y’a pas de soucis de mon coté, hein ? »

Au contraire encore une fois, ça la rassurerait de pas le laisser ressortir par les temps qui courraient. Elle savait pas trop où Klee habitait -si peu qu’il habitait vraiment quelque part- mais elle était quasi-certaine que sa maison était plus safe que l’endroit où dormait son ami.